dimanche 20 mars 2011

Modibo Sidibé futur candidat de l'Adéma ?

 Modibé Sidibé, 1er ministre. Il est soutenu par une frange
non négligeable des caciques de Adéma
Le PASJ à la recherche de l’âge d’or perdu


                                                          

L’ arène politique malien qui n’en fini plus d’alimenter les chroniques, par ses agitations et l’éternel émiettement des formations qui le composent, suit en réalité un cheminement qui nous paraît aussi laborieux que standard pour une jeune démocratie, vieille de seulement deux décennies. Mais fait nouveau, le fossé de plus en plus profond qui se creuse entre les appareils politiques et les populations, les militants à la base, qu’ils sont censés représentés, laisse entrevoir les prémisses d’une dégringolade progressive des grandes formations de Bamako (la capitale).

Et l’Adema Pasj qui demeure, de nos jours, le plus grand parti politique malien, par son encrage social et une relative survie de ses structures internes sur l’échiquier national, n’échappe pas à la règle. En effet, depuis quelques mois maintenant, les spéculations vont bon train quant à une probable candidature de Modibo Sidibé, actuel premier ministre, sous le drapeau et les couleurs du parti de l’abeille « solitaire » aux prochaines présidentielles, prévue en 2012.

Mais en réalité, sans tomber dans une quelconque délation ou critique stérile, le citoyen lambda sait pertinemment que Modibo Sidibé n’est et n’a jamais été militant du parti de Bamako-Coura. Disons qu’ il s’agit là de la volonté d’une frange non négligeable des caciques du Parti, de propulser au devant de leur troupe une candidature potentiellement considérée comme favorite parmi les favoris de la course à Koulouba. Au demeurant, l’ancien président Alpha Oumar Konaré, notamment membre fondateur de l’Adema, dont il fut le candidat lors des deux premières présidentielles, serait fortement favorable à une poussée vers la ligne de front de l’actuel premier ministre.

Or, il se trouve que Diouncounda Traoré qui est le président du parti est dores et déjà en campagne, persuadé qu’il n’a jamais été aussi proche de Koulouba. Bref, si on compte les autres candidatures motivées soit par un positionnement stratégique, soit par le jeux des écrans, on s’aperçoit tout de suite des errements qui couvent au sein de la ruche.

Mais à y voir de près, nous pensons que l’Adema qui a une vingtaine d’années d’existence ne semble pas avoir suffisamment appris de leçons du passé. Car, le problème auquel ce grand parti est confronté n’est pas forcement lié à la question de leadership dont l’ absence totale angoisse durement les amis de Alpha Oumar Konaré. Diouncounda n’a certes ni les qualités politiques, ni le charisme de AOK, mais il demeure un véritable homme d’appareil. Son manque de crédibilité que ses détracteurs lui reprochent, trouve son explication beaucoup plus dans le caractère confus de la ligne idéologique même de l’Adema que son incapacité à pouvoir fédérer.

Il est vrai que parmi tous les candidats qui affûtent aujourd’hui leurs armes, y compris le président Traoré, nul n’est capable de faire renaître l’espoir d’une victoire aux prochaines présidentielles. Une telle situation nous inspire une interrogation assez fondamentale : Cette Adéma d'aujourd’hui fait-elle rêver, au sein de son propre électorat, et de ses propres militants ? Répondre à cette question reviendra à répondre à la problématique même de l’absence de leadership au sein de la ruche.

Pour rappel, disons que l’Adema (Association puis Parti), comme le Cnid et d’autres formations créées dans l’euphorie du 26 mars 1991, est né d’un engouement sans précédent dans l’histoire politique du Mali. Les hommes et les femmes qui le composaient venant d’horizons différents avaient cependant un dénominateur commun : la soif de liberté.

Aujourd’hui, il n’ y a aucun idéal qui rassemble tout ce beau monde. il n'existe pas de "contrat social" entre l'exécutif et la la base. L’on se pose sans cesse la question de savoir quel est le crédo de l’Adema. Est -elle un parti de type Marxiste (comme on le disait sous Alpha) ? socialiste ? Réformateur ? libéral ? socio-populaire comme le PT (parti des travailleurs) de Lula  ? les militants de Gao, ceux de Diamou, Ansongo Yankasso ou de Bamako veulent qu’on leur raconte l’Histoire, pas des histoires. Un parti politique qui n’a pas de vision idéologique explicite peut –il envisager un programme conséquent ? les Abeilles doivent plus que jamais donner plus de lumière à leur vision de l’économie, du social, de l’éducation, de l’industrie … Faute de quoi, aussi éloquent et charismatique soit le "leader", il ne saurait être audible, dans un tourbillon de tohu bohu.

En ce qui concerne la candidature de Modibo Sidibé, nous pensons qu’elle s’explique clairement par les raisons ci-haut évoquées. Il serait hasardeux de prédire une défaite de Modibo Sidibé au cas où il serait candidat de l’Adema. Toutefois, nous estimons qu’il s’agit d’une stratégie qui ne porte que du seul point de vue électoraliste. Encore que des doutes subsistent quant à la capacité d’une telle candidature de pouvoir rassembler toutes les innombrables tendances qui s’affrontent au niveau du Comité Exécutif du parti.

A long terme, il est clair que Modibo Sidibé n’étant pas un pur produit de l’Adema, il a muri dans les travées du pouvoir, il aura les coudées plus franches que ne l’espère les habitués du partage de cadeau. Ensuite, L’homme est tout sauf un habitué des tracas des meetings et autres empoignades du microcosme politique bamakois. En sommes, une victoire de Modibo ferait la gloire de ce dernier, sans forcement redorer l’image de l’Adema. Et pire encore, le PASJ risque fort de se retrouver, une énième fois, amputé. Mais cette fois-ci de sa mouvance la plus opportuniste, celle qui appelle de tous ses vœux une candidature Modibo Sidibé. Dans tous les cas, un parachutage de M. Sidibé occasionnera inévitablement des tensions assez importantes à Bamako-Coura. Les « gros bonnets » de la ruche ne doivent pas perdre de vue cette dimension de la réal politique.

Le plus inquiétant dans cette affaire de candidature, faut -il le noter, est que les militants à la base, tout comme la Jeunesse Adema, qui sont la cheville ouvrière de la ruche, semblent être totalement ignorés. Justement, c’est à cette jeunesse qu’il incombe d’amorcer la révolution idéologique tant attendue. Cela fait vingt ans que ce sont les mêmes qui mènent la même stratégie, fondée uniquement sur l’enrichissement personnel des barons. La purge qui a toujours manqué à l’Adema doit s’opérer nécessairement, il y va de l’avenir du Parti.

                                                            Boubacar Mody Sacko

Aucun commentaire: