dimanche 8 juillet 2012

Cheick Modibo Diarra relèvera t-il le défi ?


C’est une mission particulièrement difficile qui a été confiée à ce grand astrophysicien Malien. Un homme dont les qualités intellectuelles – il a servi à la NASA - et l’engagement panafricain doublé d’une certaine renommée internationale auront été déterminants dans le choix qui fut porté sur sa personne pour assurer la primature de cette période de transition. Mais si l’homme est volontaire, je profite de cette tribune pour lui rendre un grand hommage, est –il pour autant taillé pour la politique, un métier dont la pratique requiert certaines qualités et surtout de l’expérience ?
Aujourd’hui, il est aisé de constater que la gestion des affaires publiques, notamment la situation politico-sécuritaire s’avère plus compliquée que prévue, tant le contexte socio politique dont le premier ministre Cheick Modibo Diarra a hérité est assez atypique. D’où la pression de la communauté internationale pour que soit mise en place un gouvernement d’union nationale. Et le Conseil de sécurités des Nations Unies est allé, dans une résolution, le jeudi dernier, jusqu’à conditionner son mandat à une meilleure lisibilité de la gestion du pouvoir de Bamako.

Mais comment en est –on arrivé là ? Après presque trois mois passés aux commandes du Mali, on peut esquisser quelques réflexions d’ordre pratique. S’il y a un constat que tout le monde partage c’est bien la détermination et l’engagement patriotiques dont le Navigateur interplanétaire a fait montre jusqu’à présent. On ne peut pas non plus lui faire le reproche d’être venu au pouvoir dans le dessein d’assouvir des ambitions politiciennes ou pour une quelconque raison de marmite.
Au rang des motifs de satisfactions de la nouvelle équipe dirigeante, on peut également noter une réelle volonté d’assainissement des finances publiques. La lutte contre la corruption et la transparence dans la gestion des derniers publics semblent être pour le moment l’une de leurs priorités.

En revanche le manque, désormais visible, d’expérience politique dans une situation aussi complexe que celle que nous vivons, constitue un handicape qui, si Cheick Modibo Diarra ne s’y tient pas garde, le conduira à quitter prématurément le gouvernement sans atteindre ses objectifs.
La première grande erreur de M. Diarra a été de n’avoir pas voulu d’un gouvernement d’union national à un moment où non seulement les accords de Ouagadougou le recommandait explicitement, mais également où le pays en avait le plus besoin. A notre propre avis, CMD n’a pas su profiter de sa position médiane pour faire accepter aux militaires certaines décisions qui allaient dans le sens d’une convergence de toutes les composantes du pays. Est –il besoin de rappeler que les partis politiques font partie du jeu démocratique. Que ces formations sur lesquelles nombre de gens crachent aujourd’hui ont un certain encrage social qui est indéniable.

Le premier ministre actuel a peut être sous-estimé le fait que les Maliens étaient partagés. Qu’une grande partie de la population voyait en ces militaires des aventuriers qui avaient plongé en toute irresponsabilité leur pays dans l’abîme, avant de refuser d’aller se battre. Le premier ministre n’a pas mesuré que le "pouvoir" et« la relative popularité » des militaires ne sauraient résister à l’épreuve du temps si toutefois le pays devait rester divisé.

Il est vrai que les militaires voulaient faire table rase de tout ce qui a constitué « l’ANCIEN POUVOIR ». Mais dans la pratique, on voit bien que ce n’est pas possible, la preuve en est que M. Diarra lui-même a été obligé de faire rentrer dans son équipe des hommes et femmes considérés jusqu’alors comme indésirables puisqu’ayant fait partie du régime dictatorial de Moussa Traoré…
La deuxième grave erreur de CMD est de n’avoir jamais su imprimer à ce pays une marque qui lui est propre. Il a toujours préféré évoluer dans le sillage( presque avec une forme de dévotion) des putschistes, se contentant parfois d’être leur porte parole. A telle enseigne que quand le premier dit quelque chose la veille à la télé, le lendemain le capitaine Sanogo répète la même chose. Sinon comment comprendre que ce grand Monsieur qui a côtoyé les grands de ce monde ne puisse pas voir que le Mali n'a plus d’armée ! l’homme est allé jusqu’à s’opposer à toute intervention militaire de la
CEDEAO.

En ce qui concerne la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, je suis d’avis qu’il est nécessaire d’associer à la gestion de cette période de crise toutes les composantes du pays : les religieux, la société civile, les regroupements politiques, les militaires, les Maliens de la diaspora, les syndicalistes… J’ajoute qu’il serait plus intelligent qu’une telle équipe puisse compter dans ses rangs la présence d’une personnalité forte de l’ethnie Tamasheq de la trempe de Assarid Ag Imbarcaouane . Un tel gouvernement est d’autant plus nécessaire qu’un pays en guerre ne peut s’offrir le luxe d’avancer en rangs dispersés.



                                                                                         Boubacar Mody Sacko

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